THE CHRONICLES OF RIDDICK : Escape from Butcher Bay

Plate-forme Xbox (PAL)
Genre FPS
Editeur Vivendi Universal
Développeur Starbreeze
Date de sortie 1er Juin 2004 (US)
Texte 10174 caractères
Captures 15

 

 

 

 

 

 

 

 

2004 aura réellement marqué le renouveau du FPS. Non pas que le genre soit démodé mais cette année aura accueillie un nombre impressionnant de jeux dans le domaine, de très bonne qualité en générale. Du côté des PC, le surprenant Far Cry et sa réalisation de toute beauté, Doom 3 qui a propulsé le jeu vidéo dans une nouvelle ère en matière de graphisme, avec ses détails et son visuel, Pain Killer qui renoue avec le FPS bourrin de nos premiers amours (Doom, Duke Nukem 3D puis Serious Sam) et le très attendu Half Life 2 qui dispose de l’avantage en terme de gameplay, de scénarisation et de narration environnementale. Du côté des consoles, Halo et Killzone sont venus hanter les joueurs sur Xbox et PlayStation 2. Parmi ces mastodontes, un outsider est venu chatouiller les plus grands, d’abord dans une version Xbox, portée ensuite sur PC avec quelques bonus. The Chronicles of Riddick : Escape from Butcher Bay utilise la licence de Riddick, revenue avec le film du même nom, quelques années après Pitch Black, pour offrir un mélange de FPS, de jeu d’aventure et d’infiltration, reprenant certaines orientations du Breakdown de Namco sur Xbox, également sorti cette année.

Comment un titre venu de nulle part a pu créer la surprise en matière de FPS et venir côtoyer les meilleures réalisations de cette année pourtant très chargée ? Riddick est avant tout un audacieux pari technique, le premier jeu à utiliser le Normal Mapping sur console, qui permet un rendu de qualité exceptionnel. Mais les qualités de Riddick ne se limitent pas à son seul aspect technique, comme nous allons le voir durant cette petite critique.

Immersion
Riddick est un curieux mélange de FPS et de jeu d’infiltration, avec quelques passages d’aventure. Un subtil cocktail magnifié par un level design à la hauteur de nos attentes, très rigoureux en terme de contenu. Riddick est simple, il s’agit de successions de couloirs, avec quelques alternances des phases de jeux. Sans promettre mondes et merveilles au joueur, Riddick offre une aventure de toute beauté, courte mais bien faite, avec beaucoup de petits détails mûrement réfléchis.

L’immersion est au top, grâce à une interface minimaliste, des effets visuels excellents, notamment le changement de focal très bien vue lorsque Riddick s’accroupie (les perspectives changent complètement). Certains petits détails anodins comme le fait de voir sa propre ombre ainsi que ses membres lorsqu’on se penche vers l’avant donnent enfin l’impression de ne pas simplement diriger une caméra, impression qui hante même les meilleurs titres de ce genre. L’inventaire est géré de manière très simple, ce qui permet de ne pas sortir du jeu pour rentrer dans les menus.

Le point crucial est la vision particulière de Riddick, qui offre des effets spéciaux et déformations de l’image assez spectaculaires, tout en étant décisifs dans le gameplay. Il est régulièrement nécessaire de changer de vision pour profiter de l’avantage de Riddick sur ses adversaires, la possibilité de voir dans le noir. D’ailleurs les nombreux passages d’infiltrations sont superbement stressants, avec les lumières virevoltantes des gardes qui non seulement vous dévoilent au grand jour, mais vous aveuglent par la même occasion.

L’ambiance de Butcher Bay est glauque à souhait, avec des teintes sombres mais d’une rare finesse. Les contrastes de lumière sont particulièrement bien utilisés et certains écrans sont de toute beauté. La direction artistique est vraiment de bonne qualité, ce qui permet de générer des ambiances uniques : Butcher Bay se découpe en plusieurs parties souvent reliés par des tunnels, dans lesquels Riddick passera beaucoup de temps. Ces passerelles permet de lier les niveaux entre eux afin d’éviter des allers-retours trop fréquents.

Riddick est de toute beauté, utilisant sans cesse le bump mapping, le normal mapping et des effets visuels franchement spectaculaires : Light specular, ombres portées de grandes classes, en bref, c’est le festival avec une direction artistique remarquable. Autant dire que Riddick explose la quasi-totalité des FPS sur console. L’interface se paye même le luxe d’être en 3D, même si cela ne change absolument rien. Enfin, les environnements sont d’une rare finesse et d’une finition exemplaire.

Tenchu à la première personne
Le gameplay est bien calibré : beaucoup de mouvements pas trop compliqués à mettre en place, de nombreuses interactions contextuelles et des idées de gameplay aussi intéressantes que jouissives (les contres, les enchaînements, retourner un fusil contre son propriétaire sont les idées les plus sympathiques). On note également une bonne utilisation des « boutons » analogiques, ceux qui s’utilisent en pressant les sticks analogiques, encore peu utilisés de nos jours et qui deviennent rapidement naturels.

Autant le fait de passer à la troisième personne n’avait aucun intérêt dans Doom 3, hormis pour illustrer les prouesses techniques dans la modélisation des personnages, autant les changements de point de vue de Riddick font leur petit effet, grâce à des travellings lors des passages où il faut grimper. Cela donne du rythme et permet d’effacer les échelles souvent handicapantes dans les FPS traditionnelles, défaut auquel même les plus grands comme Half Life n’ont pas échappé. Cela donne de la variété à la progression et libère un peu le joueur de son lot de stress quotidien, car la vie dans Butcher Bay est bien loin d’être de tout repos.

Riddick s’apparente parfois à un Tenchu à la première personne, très immersif grâce à la vue adoptée et vraiment bien construit. Si les déplacements surprennent un peu au début, on se fait rapidement à la jouabilité, qui ne pénalise quasiment pas les joueurs de FPS consoles car la plupart des affrontements peuvent se régler à la main, sans avoir besoin de viser. On évite le principal problème de Killzone, à savoir la difficulté de viser sans avoir recours à la souris.

Ce tenchu à la première personne intègre une composante combat intéressante puisque l’on peut faire des enchaînements. L’inclusion d’une notion de timing pour effectuer des contres est également une très bonne chose, d’autant que les confrontations se déroulent souvent en proximité. Cela permet de régler sans encombre la plupart des passes de force. Un peu trop aisément peut-être…

Un bon "ride" mais perfectible
Riddick est bien rythmé dans l’ensemble, mais il demeure loin d’être parfait. Tout d’abord, dès qu’il faut faire des allers-retours dans les phases d’aventure, les loadings viennent peser dans la balance. Le passage des combats dans l’arène est assez ennuyeux car il faut régulièrement changer de zone. Par ailleurs, cela manque parfois de retour en terme d’information : dans certaines quêtes, on ne voit pas toujours exactement ce qu’il faut faire, certaines choses n’étant pas très bien expliquées. Plus grave, si les alternances de phase de gameplay différentes permettent de renouveler la progression, leur intérêt n’est clairement pas du même niveau : si les phases d’infiltration sont les meilleures, les phases de tirs sont nettement moins intéressantes (plus classiques) et il arrive même que certaines armes viennent complètement gâcher le gameplay introduit dans certains passages. Je pense notamment au pistolet tranquillisant qui transforme une bonne partie du jeu en promenade de santé.

La difficulté de Riddick est d’ailleurs loin d’être exigeante : certains passages nécessitent de s’y reprendre à plusieurs fois mais on ne sent pas réellement de progression de la difficulté durant le jeu. Les phases les plus offensives sont les phases où l’on peut clairement tous démolir, mais leur intérêt est vraiment réduit. Finalement, on se prend parfois à regrette que Riddick ne soit pas simplement un jeu d’infiltration. Le côté aventure n’est pas assez présent ni assez développé, et le reste oscille entre le trop classique (phases de tir) et le trop simple (phases de destruction). En revanche, les phases d’infiltration sont simplement excellentes, stressantes à souhait grâce à la vue et jouissives, au niveau des possibilités.

Conclusion
Riddick est vraiment une très bonne surprise. Très convaincant visuellement, il renouvelle le genre FPS grâce à son côté infiltration et la puissance immersion qui s’en dégage. Un outsider grand luxe que l’on n’attendait pas forcément et qui s’impose comme l’une des meilleurs réussites du FPS sur console. De part l’orientation de proximité du gameplay, le handicap de l’absence de souris n’est absolument pas pénalisant et la manette permet même de fare passer l’action de manière nettement plus charnelle. On retrouve un peu de Tenchu, un peu de Half Life et de Splinter Cell dans ce Riddick. Mais alors que l’on se demande quel est la cohérence dans le gameplay d’un Splinter Cell, où la majorité des passages sont balayés en explosant les sources de lumières (casser les lampes dans un immeuble ne semble vraiment pas être une manière naturelle de s’infiltrer à notre époque), Riddick est nettement plus consistant car son univers est sombre à la base. Il semble quasiment naturel de s’aventurer dans l’obscurité de Butcher Bay et de détruire les lampes pour profiter de la supériorité de Riddick dans le noir, d’autant que cette possibilité ne nuit pas au gameplay.

Finalement, même si Riddick ne dépasse pas le cap du jeu vraiment bien foutu mais trop court, il s’impose comme un choix intéressant sur Xbox et brise un peu l’hégémonie de Halo sur cette machine. Il n’y a rien de vraiment exceptionnel mais l’ensemble se nourrit d’idées sympathiques, avec un certain brio en terme de level design et d’immersion. Cette dernière est la grande force de Riddick, outre l’univers décadent et les répliques de Riddick, l’incarnation même de l’esprit « série B ». L’importance du son est d’ailleurs décisive dans l’immersion, tout comme la consistance de l’univers avec beaucoup de personnages différents, tous caractérisés.

Une belle réussite qui sort un peu des sentiers largement trop battus des FPS de base. Comme quoi il suffit de quelques idées et de choix décisifs pour faire un titre de qualité. La réalisation de haute volée aide tout même bien l’affaire, mais à travers cette débauche visuelle, on sent bien que les développeurs se sont posés les bonnes questions.

Yan Fanel, février 2005

Les points forts
Les points faibles
- La réalisation tout simplement bluffante
- L'intérêt très variable des séquences
- Le mélange des genres assez réussi, surtout l'infiltration
 
- L'immersion grâce aux nombreux détails
 
- Un level design de qualité